Nous sommes parfois confronté à des cas d'enfants qui vont mal et qui viennent se confier sans trop savoir quoi faire ...qui prévenir? Comment agir ? Quelle est la conduite à tenir?
Venir en aide à un enfant en danger est une obligation mais on ne sait pas toujours comment agir.
J'ai trouvé un guide sur le site de la direction départementale des Pyrénées Atlantiques. Il s'adresse aux directeurs d'école et je le trouve très clair. En voici un résumé :
- rappel du cadre juridique
Loi n°2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance modifie les règles de la loi n°89-
487 et affirme le rôle central du Président du Conseil Général qui se voit confier la coordination des
actions menées autour de l'enfant.
Il devient en outre l'interlocuteur vers lequel doit être transmise toute information préoccupante sur un
mineur en danger ou en risque de l'être.
Circulaire E.N. n° 97.119 du 15 mai 1997 rappelant l'obligation de vigilance des personnels de
l'Éducation Nationale et la procédure de signalement.
Circulaire E.N. N°97-2001-044 du 15 mars 2001 concernant la lutte contre les violences sexuelles.
Les textes concernant l'obligation de signaler :
- articles 434-1 et 434-3 du code pénal (non dénonciation de crime et non dénonciation de
mauvais traitement envers un mineur de 15 ans)
- article 223-6 du code pénal ( non assistance à personne en péril )
- article 40 du code de procédure pénale : « Toute autorité publique ou tout fonctionnaire qui,
dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, est tenu d'en aviser
sans délai le Procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements,
procès-verbaux et actes qui y sont relatifs ».
Les textes concernant le secret professionnel et le secret partagé :
- article 226-13 du code pénal
- article 226-14 du code pénal
- article 15 de la loi 2007-293 instaurant le secret partagé entre les professionnels de la
Protection de l'Enfance
- article 26 de la loi du 13 juillet 1983 imposant le secret professionnel et le devoir de
discrétion à tous les fonctionnaires.
- définition de l'enfance en danger
D'après l'Observatoire National de l'Action Sociale décentralisée (ODAS),
l'Enfance en danger est l'ensemble des enfants maltraités et des enfants en risque de danger.
♦ L'enfant maltraité est celui qui est victime de violences physiques, d'abus sexuels, de cruauté
mentale, de négligences lourdes ayant des conséquences graves sur son développement physique
ou psychologique.
♦ L'enfant en risque de danger est celui qui connaît des conditions d'existence qui risquent de
mettre en danger sa santé, sa sécurité, sa moralité, son éducation ou son entretien, mais qui n'est
pas pour autant maltraité.
- les pôles d'intervention
La Loi 2007-293 du 5 mars 2007 a clarifié la ligne de partage entre les deux grands pôles
d'interventions : la protection administrative, sous l'autorité du Président du Conseil Général et la
protection judiciaire, sous l'autorité du Juge des enfants.
L'Intervention administrative
Le Conseil Général, pivot du dispositif, est chargé de recueillir, d'évaluer et de traiter toutes les
informations préoccupantes, quelles qu'en soient leur provenance, relatives aux mineurs en danger
ou susceptibles de l'être, en les centralisant au sein d'un lieu unique : La Cellule Départementale de
l'Enfance en Danger (CDED).
L'information préoccupante: tout élément d'information (sociale, médicale ou autre) susceptible de
laisser craindre que les conditions d'existence mettent ou risquent de mettre en danger la santé, la
sécurité, la moralité ou l'éducation de l'enfant et qu'elles puissent compromettre gravement son
éducation ou son développement physique, affectif, social et intellectuel.
L'Intervention judiciaire
La loi réserve plutôt ce mode d'intervention lorsque la situation de l'enfant comporte une notion de
péril imminent ou d'infraction pénale, nécessitant une protection judiciaire sans délai.
Dans ce cas, il s'agit de saisir directement le parquet. On conserve alors le terme de signalement.
(Rappel: l'allégation d'abus sexuel entre dans cette catégorie, et ne doit faire l'objet d'aucune
investigation).
- les signes
Un faisceau de signes, d'indices, de symptômes, indique une éventualité d'enfant en
danger ou en risque de danger.
Il s'agit d'être à l'écoute et vigilant.
Les signes d’appel peuvent être discrets, insidieux ou récurrents.
♦ Désintérêt pour les activités scolaires
♦ Difficultés scolaires non expliquées
♦ Absences non motivées
♦ Arrivées tardives ou précoces à l'école, retours tardifs, fugues, négligence parentale
(sommeil, alimentation, hygiène, habillement, équipement scolaire, séjours parascolaires,
suivi médical)
♦ Retard psychomoteur, troubles du langage inexpliqués
♦ Attitude craintive ou peureuse, agressivité ou repli sur soi
♦ Attitude de « bourreau » ou de « victime » face à ses camarades
♦ Recherche constante ou rejet de l'adulte, troubles du comportement...
En cas d’abus sexuels : les symptômes « écrans » sont multiples et doivent être décodés
♦ Maux de tête
♦ Douleurs abdominales vagues
♦ Comportement érotisé
♦ Troubles psychosomatiques, boulimie, anorexie
♦ Dépressions
♦ Automutilations...
Toute baisse soudaine des résultats scolaires, tout changement brutal de comportement
ou d'attitude, doit aussi attirer l'attention.
L'accélération et le cumul des processus (fugue, absentéisme, tentative de suicide...) doivent nous alerter.
- Qui peut vous aider ?
Médecin scolaire, infirmière, psychologue scolaire.
L'aide social à l'enfance, le parquet, la gendarmerie ou le commissariat, le pôle départemental de la protection de l'enfance.
le 119 numéro national
- Que faire selon les situations ?
Types de situations Suites à donner
N° 1 Révélation directe de la victime de faits précis et circonstanciés
- viol
- tentative de viol
- agressions sexuelles
- atteintes sexuelles
Saisir le Procureur de la République par fax (signalement)
Informer éventuellement le médecin scolaire*, la psychologue et/ou l'infirmière
Informer le directeur académique (sous couvertde l’IEN)
Envoyer copie à la CDED
N°2 Mauvais traitements avérés avec blessures constatées
Alerter le médecin scolaire* de l'école
Saisir le Procureur de la République par fax
(signalement)
Informer le directeur académique (sous
couvert de l'IEN)
Envoyer copie à la CDED
N°3 Enfant en risque de danger: suspicion de négligences éducatives, de mauvais traitements,
d'abus sexuels, rumeur, autres situations...
Si l'auteur présumé est un adulte de la communauté scolaire
Alerter le médecin*, l'infirmier et le psychologue scolaire
Procéder à une évaluation pluridisciplinaire au sein de l'école et saisir la CDED du Conseil
Général (envoi de l'information préoccupante)
Informer le directeur académique (sous couvert de l'IEN)
Saisir sans délai le directeur académique sous couvert de l'IEN
* Avant la grande section de maternelle les informations préoccupantes et les signalements sont transmis directement sans saisine du médecin de l'éducation nationale qui a pour missions d'intervenir à partir de la grande section de maternelle.
- conseils et précautions
1 CONSEILS
Parce qu'il s'agit d'une situation complexe et difficile, il est important de ne jamais rester seul
face à une situation d'enfant en danger ou en risque de l'être pour :
– Partager un doute, une parole d'enfant recueillie
– Evaluer et approfondir la connaissance d'une situation
– Atténuer les conséquences de cette situation
– Vérifier si une intervention est déjà en cours
Pour obtenir des informations complémentaires et un soutien, vous contacterez le médecin,
l'infirmière et/ou le psychologue de l'Education Nationale. Ils seront en mesure de vous aider à faire
appel aux partenaires (CDED, responsable MSD, associations...).
2 PRÉCAUTIONS
■ Auprès de l'enfant
Il s'agit de recueillir la parole de l'enfant sans commentaire personnel, ni interprétation, ni
jugement de valeur ; au besoin mener avec lui un entretien sans investigation.
Il faudra expliquer à l'enfant votre mission et responsabilité d'adulte enseignant pour l'aider
ainsi que sa famille.
■ Auprès de la famille
Les droits au respect de la vie privée des enfants et de leur famille impliquent :
la plus grande discrétion
le respect de la stricte confidentialité, sachant « que le partage des informations
relatives à une situation individuelle est strictement limité à ce qui est nécessaire à
l'accomplissement de la mission de protection de l'enfance » (extrait article L.226-2-2 du
CASF)
Le père, la mère, toute autre personne exerçant l'autorité parentale, le tuteur, l'enfant en
fonction de son âge et de sa maturité sont préalablement informés selon des modalités
adaptées, sauf si cette information est contraire à l'intérêt de l'enfant. (extrait de l'article
L226-2-2 du CASF). L'information des parents est systématique sauf dans les cas où
l'auteur de violences sexuelles (cas n°1) ou de maltraitance avérée (cas n°2) est un
membre de la famille.
La présomption d'innocence quel qu'en soit l'auteur
■ La situation
Partager les éléments d'une situation d'enfant en danger ou en risque ne signifie ni apporter
la preuve des faits, ni apprécier les responsabilités.
- Aide à la rédaction
Dans tout écrit, il est absolument indispensable de noter un maximum de renseignements d'état-civil
concernant l'enfant, ses parents ou responsables légaux ainsi que le contexte dans lequel sont recueillis
les éléments ou confidences :
nom, prénom, date de naissance (lieu de naissance si possible)
adresse où réside l'enfant, sa classe, son régime
ainsi que des éléments relatifs à sa scolarité
– Si l'enfant est amené à révéler des violences subies, il est important de retranscrire ses propos
littéralement, entre guillemets, sans interprétation.
– Dans la mesure du possible, il est recommandé que la personne à l'origine de l'information
préoccupante indique ses coordonnées téléphoniques professionnelles et personnelles afin de
pouvoir être jointe facilement.
– Si plusieurs personnes sont dépositaires d'informations, de confidences, chacune des personnes
concernées rédige un écrit.
En cas de saisine directe du Parquet pour cause d'urgence exclusivement, une copie de l'information
préoccupante doit être adressée systématiquement à la Cellule Départementale de l'Enfance en
Danger.
Une copie de tout signalement ou information préoccupante envoyée au parquet ou à la CDED doit
être transmise sans délai au directeur académique sous couvert de l'IEN.
Garder en votre possession un double de vos écrits.
Le retour d'informations sera directement effectué auprès de l'école par la CDED.
Le délai pourra être plus ou moins long (de quelques heures à plusieurs semaines) en fonction de la situation.